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Aube Elléouët Breton a eu la générosité d’offrir un de ses collages afin qu’il puisse être vendu au bénéfice de l’ISSS Paris pour aider de jeunes chercheurs et chercheuses à venir à la conférence de Paris.

Aube Elléouët Breton has generously offered one of her collages to be sold for the benefit of ISSS Paris, in order to support young researchers in attending the conference in Paris.

Aube Elléouët Breton, Les Argonautes II, 2006. Collage sur papier (53,5 x 34,5 cm).

Starting price: 4500€.

Les éventuelles personnes intéressées pour l’acheter doivent se rapprocher de Fabrice Flahutez à fabrice.flahutez@univ-st-etienne.fr.

Interested buyers should contact Fabrice Flahutez at fabrice.flahutez@univ-st-etienne.fr.

This auction has been made possible thanks to the generosity of Aube Elléouët Breton in conjunction with Atélier André Breton, and proceeds will be donated to the ISSS to support graduate students in surrealism to attend the annual ISSS conference.

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Au regard des créations d’Aube Elléouët Breton, Les Argonautes II apparaît comme une œuvre sobre. À partir de seulement quelques éléments d’une réalité commune, la collagiste crée un ailleurs inconnu. Les éléments du collage composent une structure décentrée et oblique, comme un équilibre précaire qui accorde au fond noir une place aussi importante que les images qui s’y superposent. De gauche à droite, notre regard introduit par une flamme s’éloigne de la surface pour plonger vers un quartz.

Parmi les collages proposés par David et Marcel Fleiss à la Galerie 1900-2000, Les Argonautes II a tout particulièrement retenu notre attention. Une flamme haute attire à elle notre regard. Du fond noir dont elle émerge, cette flamme nous invite dans un premier temps à entrer dans ce paysage avant de nous laisser percevoir les éléments voisins. Elle surplombe des roches de granit parsemées de lichen. Entre ces roches, nous distinguons les vagues et l’écume d’une mer calme. De l’obscurité du papier, un trésor se détache : d’abord un grand quartz cristallin, puis deux bustes féminins romans sculptés dans la pierre, un oiseau faisant le pont entre ce qui fera office de deux cercles de lunettes décorés de pierres scintillantes. À la source de la flamme, une Ève dont la teinte la distingue à peine du granit. De sa main gauche, elle tient une pomme ; de sa main droite elle accompagne sa bouche d’où s’échappe un corail enflammé. Trois autres coraux s’élèvent dans le feu. Au centre du collage, des coraux renversés, abîmés, morcelés – brûlés ? – semblent couler. Un détail de ces coraux révèle l’artificialité de ce paysage. Le découpage a par moment manqué de détacher le fond blanc duquel l’artiste a emprunté ces images de coraux. La finesse des branches rend délicat ce travail de précision. Ce manquement rend d’autant plus fragile ces coraux de papier.

Le collage est exposé pour la première fois en 2006 par David et Marcel Fleiss à la galerie 1900-2000. Le catalogue édité par la galerie est introduit par un texte – un conte – de la collagiste :

« À cause de la légende de la nuit à Plougrescant.

Là, les naufrageurs affirmaient que la biographie

du brocanteur comportaient des lacunes ; n’y étaient pas cités :

Les géomètres, la cartomancienne, les métiers oubliés,

les trois stations, les argonautes et le bilboquet. »

(Aube, 2006)

Ce texte nous impose autant d’interrogations qu’il nous propose d’échos résonant avec ses collages. L’un d’entre eux se fait entendre dans Les Argonautes II.

Le titre fait appel à un imaginaire collectif et familier, entre histoire et mythe. Alors que ce dernier insiste sur la dimension marine du collage, la flamme paraît d’autant plus étrangère à ce paysage. Ce collage ne fait pas exception, le thème marin est presque permanent dans la création d’Aube Elléouët Breton. Isidro Hernandez Gutiérrez écrit d’ailleurs :

« Quand on aborde la facette collagiste d’Aube Breton Elléouët il faut aussi rappeler sa préférence pour les motifs marins et les allusions constantes à la Bretagne française héritière d’une riche tradition orale de narrations et légendes et qui sert de décors ses créations à l’imagination débordante. »

(Alan Glass, Carlos de Laborde Noguez, Aube Breton Elléouët, Marcel Fleiss. Isidro Hernandez Gutiérrez, « À propos d’Aube Elléouët Breton », Aube Breton Elléouët Collages, 2017, p. 19.)

Le texte introductif composé par Aube en 2006 nomme la commune de Plougrescant qui est souvent représentée dans les collages de l’artiste. Cette commune abrite notamment la chapelle romane Saint-Gonéry, classée aux monuments historiques depuis 1996, mais elle est surtout célèbre pour Castel Meur, maison entre deux roches de granit. Si de nombreux collages d’Aube Elléouët Breton la représente (Entre chien et loup, 2009. Collage sur papier (17 x 24 cm), La nuit à Plougrescant, 1990. Collage sur papier (44 x 78,5cm), Le filet, s.d.), elle est absente de Les Argonautes II. Les allusions à la Bretagne sont-elles pour autant éclipsées ? Au contraire, le granit, le quartz et les bustes romans évoquant la chapelle Saint-Gonéry sont autant de rappels à la région bretonne – et de Plougrescant en particulier. Nous pourrions d’ailleurs avancer que ces éléments, par leur minéralité et stabilité constituent un ensemble cohérent, d’autant plus lorsque juxtaposés au mouvement d’une flamme brûlant des coraux qui échouent vers les fonds. L’opposition nette entre ces éléments, soutenue par les couleurs rouges contrastant avec les teintes grises, s’avère cependant simpliste si l’on rappelle la présence de coraux au large de la côte bretonne. Le corail oscille alors entre la permanence de la pierre et l’instabilité de la flamme qui le consume.

Par ailleurs, il ne s’agit pas de la seule occurence du buste roman féminin dans les collages de l’artiste. Cette figure est reconnaissable. Droite, sa tête est enserrée d’un bandeau et d’une coiffure relevée qui révèle des boucles d’oreilles tombant sur les épaules. Les bras le long du corps sont rompus au niveau des coudes. Elle est à nouveau représentée dans La Donne II (2010) parmi les « dizaines d’idoles féminines [qui] tombent à pic face au déploiement d’un jeu de cartes. » (Ibid.). Serait-ce là encore une citation de Plougrescant ? S’il ne s’agit pas d’un motif aussi récurrent que le monde marin, la chouette ou les cartes à jouer, cette figure s’inscrit dans l’univers visuel qu’offre Aube Elléouët Breton. Elle nous plonge dans sa vision singulière, et sans réticence, nous la suivons pour aller ailleurs.

Bibliographie

Aube Elleouet – Collages. Cat. exp. (14 décembre 2006 – 20 janvier 2007). Paris, Galerie 1900-2000, 2006.

Alan Glass, Carlos de Laborde Noguez, Aube Breton Elléouët, Marcel Fleiss. Isidro Hernandez Gutiérrez, « À propos d’Aube Elléouët Breton », Aube Breton Elléouët Collages, 2017.